Louis Guédet

Vendredi 21 août 1914

9h soir  Grande nouvelle !!?? Désespoir des uns, calme des autres ! Je suis de ces derniers. Bruxelles est occupé pris ? par les allemands ! C’est une défaite pour nous, une victoire pour Eux !!! Et pourquoi ?

Ne nous emballons pas inutilement ! Je ne suis en aucune façon grand clerc en stratégie ou en tactique ! mais il me semble qu’il n’y a pas lieu de se désoler. Quoi ? les allemands sont entrés à Bruxelles ? L’ont-ils pris de vive force ? non ! Alors où y a-t-il eu défaite ? Comment on se retire même très vite pour leur laisser la place libre. Où est la grande victoire allemande ? Nulle part. Et à mon humble avis j’estime qu’en ce moment nos Sauvages sont en train de s’embouteiller. On les canalise, voilà tout ! Ils passent où nous voulons qu’ils passent. On leur a ouvert la porte et comme des imbéciles ils se sont précipités pour enfoncer la…  porte ouverte !

Nous verrons la suite, mais je crois bien que Messieurs les Prussiens vont se faire flanquer une pilée magistrale dont on garde le souvenir pour toujours. Nos bons Belges, d’Anvers, vont leur tomber sur le flanc droit au moment où ils vont faire leur conversion à gauche, c’est très dangereux cela ! Quand les Anglais « Aoh ! Yes !! » leur tiendront tête et nous les Français nous leur tomberons dessus du côté gauche (côté du cœur) et on les coupera en 2. Le tronçon de tête sera flanqué à la mer via Ostende, on fera de la soupe de Prussiens ! un peu salée pour eux ! quant à la queue…  eh bien ? nous la mangerons ! ou la culbuterons sur le Rhin. Je ne crois pas me tromper…  et espère bien que je suis bon prophète !

Impressions, Louis Guédet, Notaire et Juge de Paix à Reims. Récits et impressions de guerre d'un civil rémois 1914-1919, journal retranscrit par François-Xavier Guédet son petit-fils

Paul Hess

Aujourd’hui, les dépêches annoncent que la cavalerie allemande est à Bruxelles. Dès hier, il y avait lieu de prévoir semblable nouvelle. Que nous réserve la suite ?

  • Les journaux nous annoncent la mort de N. S. Père le Pape, Pie X.
  • Vers 13 h 1/4, vu la fin d’une éclipse de soleil.
  • Le bruit court, en ville, que le Général Sarrail, bien connu à Reims, puisqu’il commandait la 12e Division d’Infanterie lors de la mobilisation, serait passé en gare, hier, appelé à Paris, à la suite d’une affaire où de fortes pertes auraient pu être évitées.

Tenons compte que le défaut de nouvelles, actuellement, ne peut que donner crédit aux potins des gens soi-disant informés. Il n’en manque pas !

 Source : Paul Hess dans La vie à Reims pendant la guerre de 1914-1918 - Notes et impressions d'un bombardé